L'Affaire du TrentPublié le 10/07/2007 à 12:00 par quelqueshistoires
L’ « affaire du Trent » est un très grave incident naval et diplomatique survenu pendant la première année de la guerre de Sécession (en 1861) et qui a pratiquement provoqué une guerre entre les États-Unis d’Amérique et différents pays européens (dont le Royaume-Uni, soutenu par la France).
Au début de la guerre de Sécession, le gouvernement britannique est relativement satisfait de l'éclatement de la guerre civile américaine et envisageat même un moment de reconnaître officiellement la Confédération sudiste comme état indépendant.
Pour des raisons économiques toutefois, la France comme le Royaume-Uni proclamèrent leur neutralité dans le conflit en reconnaissant le caractère de belligérant aux États-Unis (dont le gouvernement est à Washington) à la Confédération (dont le siège est alors placé à Montgomery).
Mais le 8 novembre 1861, à 240 milles au nord de Cuba, l’USS San Jacinto (corvette de la Marine des États-Unis commandée par le commodore Charles Wilkes), invite par signaux le paquebot britannique Trent (qui fait régulièrement la traversée atlantique entre La Havane et Southampton) à stopper. Ce dernier, ignorant l'injonction faite et continuant sa route, le commodore Wilkes fait alors tirer au canon devant l'étrave du paquebot neutre qui doit céder à la force et mettre en panne.
Le commodore Wilkes a en effet appris, lors d’une escale à Cuba, que deux politiciens sudistes avaient pris place à bord du Trent. Les deux personnalités en question, James M. Mason et John Slidell (accompagnés de leur famille et de leurs secrétaires particuliers), avaient "forcé" le blocus de Charleston le 12 octobre précédant pour rejoindre La Havane, port espagnol, atteint dix jours plus tard avec pour mission de rejoindre l'Europe pour amener les gouvernements français et britanniques à reconnaître officiellement l'existence de la nation sudiste. Les deux diplomates, ainsi que leurs familles, furent donc débarqués manu militari du Trent malgré les protestations des membres d’équipage s'appuyant sur la neutralité du navire britannique.
Dès que le retour du San Jacinto à Fort Monroe, la nouvelle de l'arrestation des commissaires Confédérés se répand dans le Nord et le commodore Wilkes y est alors accueilli comme un héros national. Le secrétaire d'État à la Marine, lui adresse ses plus vives félicitations, les membres de la Top Society de Boston donnent un banquet en son honneur et la Chambre des représentants décide, à l'unanimité, d'accorder à Wilkes une médaille spéciale pour « sa conduite avisée et patriotique ».
Cependant, les plus hautes instances américaines restent silencieuses dans cette affaire. Ni le président Abraham Lincoln, ni le secrétaire d'État William H. Seward, ne font de commentaires. A l’inverse, le président du Comité des Affaires étrangères du Congrès, déclare que « s'il n'en avait tenu qu'à lui, [il] aurait bien forcé Wilkes à ramener lui-même ses prises en Angleterre ».
En effet, le 27 novembre 1861, de retour à Southampton, le commandant du Trent relate à quelle ''inquisition'' son bâtiment avait été soumis. Aussitôt, une tornade de réactions secoue le Royaume-Uni et la presse (en particulier le London Times) qui ameute l'opinion publique en prétendant que le Commodore Wilkes ne pouvait avoir agi sans l'assentiment de son gouvernement.
Moins de trois jours plus tard, le gouvernement britannique vote les crédits nécessaires à la mise sur pied de guerre de la flotte toute entière et à l'envoi d'un corps expéditionnaire de 8 000 hommes au Canada. Le ministre des affaires étrangères rédigea à l'intention de son homologue américain une lettre qui déclare en substance :
« Le gouvernement de Sa Majesté est persuadé que, lorsque cette affaire sera prise en considération par le gouvernement des États-Unis, ce dernier, de son propre chef, proposera aux autorités britanniques de réparer l'offense qui leur a été faite, dans les seuls termes acceptables pour le peuple britannique, à savoir : la libération des quatre gentlemen en question qui seront replacés sous la protection britannique avec des excuses à la mesure de l'agression commise à notre égard ».
Cette lettre aurait due être présentée par l’ambassadeur britannique à Washington qui, selon ses ordres, devait exiger du gouvernement fédéral une réponse officielle immédiate, au besoin en brandissant la menace d'une déclaration de guerre.
Sans aucun doute, un tel document aurait provoqué une guerre car, sinon, le président Lincoln n’aurait eu d’autres choix que de s’incliner et ainsi de perdre toute crédibilité. Cependant, avant d’être envoyée, la lettre est soumise à l’accord de la reine Victoria qui, via son époux le prince Albert, retouchera et adoucira le ton en particulier en laissant entendre que l'action du Commodore Wilkes ne résulte pas d'un ordre direct de Washington.
Dans un second document également rédigé le 30 novembre 1861, le ministre des affaires étrangères recommandera à son ambassadeur de s’abstenir de toute menace envers les États-Unis pendant une semaine, délai accordé pour laisser au gouvernement la possibilité de reconnaître ses torts et de prendre des mesures visant à libérer les prisonniers. Pendant cette période, le gouvernement français assure officiellement le Royaume-Uni de son soutien en cas de guerre.
Consulté par le gouvernement fédéral, le général MacClellan soutient alors que l’Union n’aurait aucune chance de vaincre dans une double guerre contre la Confédération et le Royaume-Uni. Aussi, la décision est prise de libérer les prisonniers et, le 27 décembre 1861, une réponse favorable (quoique dénuée de toute excuse) est transmise officiellement aux Britanniques qui l’acceptent. James Mason et John Slidell débarquent finalement à Liverpool quelque temps plus tard dans l’anonymat et l’indifférence générale.
Cette « affaire du Trent » aura finalement eut comme principale conséquence de créer un climat de confiance et de coopération entre les gouvernements britanniques et américains. Avant la crise, beaucoup de diplomates britanniques voyaient dans le secrétaire d'Etat Seward un démagogue agressif, prêt à déclarer la guerre à la Grande Bretagne. Mais son attitude conciliante et modérée allait les faire changer d’avis et renforcer les liens entre les deux pays, annonçant ainsi les futures relations américano-britanniques.
Pour bon nombre d’historiens, l’affaire du Trent représente l’un des grands « what ifs » de la guerre de sécession. En effet pour certains, en cas de double guerre, le Nord aurait été incapable de soutenir l’effort de guerre et la Confédération serait devenue une nation indépendante. Même si, pour d’autres, l’invasion britannique aurait eu pour effet d’unifier à nouveau le Nord et le Sud contre l’ancien colonialiste.
Ronan Blaise
Autre articleL'Affaire du Trent : Le Royaume-Uni va t-il déclarer la guerre aux Etats-Unis ?Le 8 novembre 1861 au nord de Cuba, un navire de la marine fédérale l’USS San Jacinto, indique par signaux lumineux au RMS Trent de stopper. Devant le refus d’obéir du paquebot britannique, le capitaine Charles Wilkes fait tirer le canon, forçant le navire à s’arrêter. Wilkes a été informé que deux représentants sudistes, James Mason et John Slidell, ont embarqué à bord du RMS Trent à La Havane pour se rendre à Southampton. Les deux hommes ont forcé le blocus le 12 octobre dernier, avec pour mission la reconnaissance de la Confédération auprès des gouvernements britanniques et français. Les Nordistes arrêtent les deux Sudistes, malgré les protestations du capitaine du RMS Trent qui rappelle que son navire est neutre.
Dès son retour aux Etats-Unis, le secrétaire d’Etat à la Marine, Giddeon Welles félicite Charles Wilkes, la Chambre des représentants lui décerne une médaille pour sa conduite avisée et patriotique et la Top Society de Boston l’invite à un banquet. Cependant, le président Lincoln et le secrétaire d’Etat à la Guerre, William Seward ne font aucun commentaire. Wilkes n’est guère apprécié ni par ses supérieurs, ni par ses hommes. C’est un officier très autoritaire et borné. Lincoln et Seward sont conscients que l’arraisonnement du RMS Trent est une violation de la liberté maritime. De plus, ils craignent des retombées diplomatiques, car le Royaume-Uni, première puissance mondiale, ne laissera pas un tel affront impuni. Le président du Comité des Affaires étrangères du Congrès résume bien la peur de l’Administration en déclarant que « s'il n'en avait tenu qu'à moi, j’aurais bien forcé Wilkes à ramener lui-même ses prises en Angleterre ».
Le 27 novembre 1861, le témoignage du capitaine du RMS Trent dans la presse émeut l’opinion publique britannique. Le ministre des Affaires Etrangères rédige une lettre à son homologue américain exigeant des excuses et une réparation officielle en brandissant la menace d’une déclaration de guerre. Dans le même temps, un contingent militaire au Canada est envoyé. Néanmoins, le Royaume-Uni n’a pas envie de se lancer dans une guerre outre-Atlantique, qui s’avèrerait complexe et coûteuse en hommes et en navires juste pour laver son honneur. Le gouvernement a d’autres sujets de préoccupations : le gros de l’armée britannique est occupé en Inde, les défenses canadiennes restent à développer et des mouvements indépendantistes agitent l’Irlande. Ainsi, la reine Victoria ne souhaite pas pousser à bout le président Lincoln. Elle réécrit le courrier en adoucissant les termes et en appuyant sur le fait que le capitaine Wilkes n’a pas pu agir sur ordre du président.
« Une seule guerre à la fois », dit Lincoln, qui ne souhaite pas rentrer en conflit avec le Royaume-Uni de peur d’être écrasé sur deux fronts et de voir la Confédération reconnue comme Etat par les puissances européennes. De plus, le Nord se fournit en salpêtre nécessaire pour la constitution de poudre, dans les colonies britanniques. Au même moment, une importante cargaison est sur le point de partir d’Angleterre. Il ne faudrait pas que l’approvisionnement s’interrompe ou prenne du retard.
Le 27 décembre 1861, Washington transmet à Londres l’annonce de la libération des deux émissaires sudistes sans pour autant s’excuser. James Mason et John Slidell débarquent à Liverpool le 10 janvier 1862 dans l’indifférence générale. Malgré leurs efforts, ils ne parviennent pas à obtenir la reconnaissance officielle de la Confédération et la prise de position du Royaume-Uni. La libération engendre un climat de confiance entre les gouvernements britannique et américain. De nombreux hommes politiques britanniques pensent que Seward est un homme agressif n’hésitant pas à déclarer la guerre au besoin. Il a prouvé qu’il n’en était rien. Quant au capitaine Wilkes, il demeure en poste, non sans se faire remarquer à nouveau pour comportements brutaux.
Les spécialistes s’amusent à savoir ce qui aurait pu se passer si le Royaume-Uni avait déclaré la guerre aux Etats-Unis. Deux scénarios existent : soit le Nord n’aurait pu mener deux guerres en simultané, ce qui aurait abouti au maintien de la Confédération comme Etat indépendant, soit le Nord et le Sud se seraient unis pour farce face à nouveau aux Britanniques dans une sorte de nouvelle guerre d’indépendance.
SourcesTexte :- Olivier MILLET : « L’affaire du Trent », article publié le 20 décembre 2013, - http://civil-war-uniforms.over-blog.com/2013/12/l-affaire-du-trent.html
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http://www.histoire-pour-tous.fr/dossiers/241-la-guerre-de-secession/3771-g…Image :http://www.sonofthesouth.net/leefoundation/civil-war/1861/november/sloop-sa…