Contexte
Durant la fin de l'année 1861 et au début de 1862, l'Union avait chassé les rebelles sudistes de l'état du Missouri.
Au printemps 1862, le général U.S. Samuel Curtis décida d'exploiter son avantage et d'envahir l'Arkansas avec son armée du Sud-Ouest forte de 10.500 soldats et de 50 pièces d'artillerie. Plus de la moitié de ses hommes étaient des immigrants fraîchement débarqués d'Allemagne.
Pénétrant dans le comté de Benton, Curtis se fortifia sur la rive nord d'un ruisseau, le Sugar Creek, dans l'attente d'une réaction confédérée.
A la tête de l'armée sudiste du secteur Trans-Mississippi, le général Earl Van Dorn marcha contre les Nordistes à la tête de 16.000 soldats incluant 800 Indiens Cherokees.
Bénéficiant, fait exceptionnel dans cette guerre, d'une supériorité numérique sur les Nordistes, Van Dorn estima être en mesure de détruire l'armée nordiste en Arkansas avant d'aller reprendre le Missouri.
Les mouvements
Mis au courant des dispositions défensives fédérales, Van Dorn abandonna l'idée d'un assaut frontal et, divisant son armée en deux, ordonna à ses subordonnées de marcher au nord, vers Bentonville, en vue de surgir derrière les forces U.S.
Par ailleurs, Van Dorn décida de passer rapidement à l'action, sans attendre son ravitaillement, ce qui pèsera lourd dans la suite des événements.
Les Confédérés réalisèrent ainsi une pénible marche de flanc, trois jours durant, au milieu d'une tempête hivernale.
Lorsque leurs forces parvinrent à destination, elles s'avérèrent peu aptes à combattre, car fatiguées et affamées.
Il faut aussi signaler que la lenteur de la progression sudiste (beaucoup de soldats ne disposaient pas de chaussures) permit à Curtis de modifier ses positions.
Toutefois, le subordonné de Curtis, Franz Sigel, se montra négligent. Il envoya un groupe de travail fort de près de 400 soldats vers l'ouest, se privant d'une part de ses effectifs pour la bataille à venir. Sigel retira également sa cavalerie de la route où progressaient les Sudistes.
Pris par surprise, le 6 mars 1862, Sigel ordonna une rapide retraite de ses troupes mais n'en perdit pas moins de nombreux prisonniers, capturés par la cavalerie confédérée. Heureusement pour le Nord, l'officier sudiste dirigeant la cavalerie, McIntosh, s'égara dans une zone boisée et intervint trop tard pour capturer l'ensemble des forces de Sigel; un assaut de cavalerie tardif contre des lignes fédérales reconstituées n'amena que la perte de 30 cavaliers sudistes, tués ou blessés.
La bataille
L'attaque sudiste contre les positions fédérales se déroula selon un mouvement de tenaille.
A droite, McCulloch passa à l'attaque avec une brigade d'infanterie (Hébert) soutenue par une brigade de cavalerie (McIntosh) et par les Indiens Cherokees (Pike).
L'assaut se concentra sur le village, depuis lors disparu, de Leetown où une féroce fusillade éclata le 7 mars dès 11H30.
Trois canons fédéraux soutinrent les défenseurs, tuant plusieurs dizaines d'assaillants.
Les 3.000 cavaliers confédérés de McIntosh chargèrent, bousculant les Nordistes et capturant leurs canons.
Egalement engagés dans l'assaut, les Indiens bousculèrent les avant-postes nordistes, faisant peu de prisonniers et scalpant ceux qui leur tombèrent sous la main.
Un peu en arrière cependant, les Fédéraux purent constituer une nouvelle ligne de défense soutenue par 9 pièces d'artillerie.
Quelques tirs peu ajustés de l'artillerie suffirent à provoquer la déroute des Cherokees.
A la tête de 8 régiments, McCulloch et McIntosh tentèrent de relancer l'assaut mais le premier fut tué d'une balle en plein coeur.
Le second, craignant de démoraliser les troupes, n'annonça pas la mort du général sudiste ni sa prise de commandement de l'ensemble de l'aile droite. Intempestivement, McIntosh s'élança avec ses seules troupes contre les Fédéraux retranchés. Rapidement, il fut lui-même tué
Pris sous les tirs de l'artillerie de l'Union et privés de leurs généraux, les Confédérés perdirent confiance.
Un nouvel assaut, mené dans le secteur très boisé de Ford Road, par le colonel sudiste Hébert, échoua, amenant la capture de nombreux prisonniers, dont Hébert lui-même.
Privés de la plupart de leurs officiers supérieurs, les Sudistes battirent en retraite dans le désordre le plus complet. Certaines troupes abandonnèrent même leurs armes dans leur fuite.
Dans le même temps, sur la gauche sudiste, Van Dorn attaqua le secteur de Elkhorn Tavern.
Il commit l'énorme erreur de ne pas engager directement ses 5.000 hommes contre des effectifs fédéraux limités et progressa avec lenteur.
Aux tirs de l'artillerie nordiste répondirent les coups des pièces confédérées.
Lançant son infanterie contre l'artillerie U.S., Van Dorn se heurta à une farouche contre-attaque nordiste. L'assaut sudiste fut contenu non loin de Elkhorn Tavern.
Vers 12H30, les Nordistes reçurent des renforts et engagèrent plus agressivement les Sudistes.
Vers 16H30 toutefois, les Confédérés semblèrent en mesure de percer dans ce secteur du front. Les Sudistes furent cependant à nouveau arrêtés au niveau de Ruddick's Fiefd, à 400 mètres de Elkhorn Tavern.
L'obscurité finit par mettre un terme aux combats dans ce secteur.
Au matin du 8 mars, Curtis massa son artillerie dans le secteur de Elkhorn Tavern et chargea son subordonné Sigel d'une contre-attaque massive.
Trois batteries d'artillerie sudistes ouvrirent le feu obligeant provisoirement les Fédéraux à se replier.
Sigel réunit alors 21 canons dans le secteur de Elkhorn Tavern, surpassant les 12 pièces sudistes. Pris sous les tirs fédéraux, les artilleurs confédérés paniquèrent et prirent la fuite.
Débarrassé de l'artillerie confédérée, Sigel tourna ses pièces vers l'infanterie sudiste dissimulée dans les bois voisins. Les projectiles causèrent des ravages dans les rangs des défenseurs; ce fut l'une des rares fois dans la guerre civile qu'un barrage d'artillerie préparatoire ouvrit la voie à un assaut d'infanterie.
En manque de munitions, réalisant que son ravitaillement était distant de plus de 30 kilomètres, Van Dorn abandonna tout espoir de victoire et ordonna la retraite.
À 10:30 heures, Sigel ordonna à deux de ses divisions de passer à l'attaque. Cet assaut hâta le repli sudiste.
Bilan
Ayant engagé 10.500 soldats, l'Union en perdit 1.384 ( 203 tués, 980 blessés et 201 disparus).
Sur les 16.000 Sudistes engagés, Van Dorn reconnut la perte de 800 tués et blessés et de 200 à 300 prisonniers. Des estimations plus objectives situent les pertes globales sudistes à 2.000 soldats, dont une forte proportion d'officiers supérieurs.
La défaite de Pea Ridge marqua la fin des ambitions sudistes de reconquête du Missouri et laissa l'Arkansas sans défense.
Curtis envisagea de s'emparer de la capitale d'état, Little Rock, mais dut y renoncer du fait d'un manque de fournitures, le front situé au-delà du Mississippi étant largement négligé par les deux belligérants.
Au cours de la bataille, Curtis resta confiant et exerça un plein contrôle sur ses troupes. Il fut par ailleurs très bien soutenu par trois de ses quatre subordonnés.
Van Dorn, pour sa part, ignora la plupart des questions logistiques et exerça un contrôle lâche de son armée, s'occupant de questions tactiques mineures après la mort de plusieurs de ses officiers supérieurs et perdant le contact avec son train de ravitaillement à un moment crucial.